35 ans de surveillance
J'ai passé le concours de surveillant en 1989 par hasard suite à une publicité dans le journal. J'ai été affecté à la Maison d'Arrêt de La Santé à Paris en 1990, et je dirais que ce sont mes plus belles années professionnelles. J'ai travaillé avec différents profils, que ce soit le grand banditisme, des tueurs, des violeurs et aussi des sans papiers, des conduites sans permis etc... J'y ai rencontré des surveillants de tout horizons qui pour certains sont devenu des amis car dans ce métier la solidarité et la camaraderie est essentielle.
En 1999, je me suis fait muté en Vendée à la Maison d'Arrêt de La roche Sur Yon. Je suis passé d'un effectif de 120 détenus sur un étage à Paris à 35 à La Roche Sur Yon. Le travail est devenu moins prenant, plus social. : on a le temps de s'intéresser aux personnes incarcérés. Du temps à leur consacrer pour parler. J'y suis resté 19 ans.
Grâce à mon ancienneté, en 2018, je suis affecté au Service Pénitentiaire d'Insertion et de Probation (SPIP) pour occuper le poste d'agent de surveillance électronique. Je ne travaille plus la nuit et le week-end et ne porte plus l'uniforme, je me rends chez les personnes condamnées par la Justice au port d'un dispositif de surveillance électronique, je suis chargé de poser le matériel.
Pour conclure, je dirais que ce travail à été très formateur sur la psychologie humaine.
Surveillance électronique
Je travaille au SPIP de Vendée comme agent des bracelets électroniques. Je suis mandaté par jugement pour me rendre chez des personnes condamnées à porter un bracelet électronique. C'est une peine privative de liberté alternative à la prison. En fonction de leur vie professionnelle, ces personnes sont autorisées ou pas à sortir de leur domicile à des heures fixées par le juge.
Depuis 2022, une autre forme de surveillance électronique est apparue : le Bracelet Anti Rapprochement (BAR). Ce dispositif concerne les auteurs de violences conjugales. Il ne s'agit ici pas une surveillance à domicile mais d'une surveillance par satellite, qui oblige les condamnés à se tenir éloigné de leur ex-conjoint. Ce travail demande beaucoup d'organisation et d'aptitude à l'outil informatique.
Autonomie
Ce travail requiert une bonne organisation, que ce soit pour les prises de rdv ou les interventions techniques qui viennent parfois se superposer. On est autonome dans cette organisation. On rend des comptes lorsqu'on rencontre des difficultés, à notre hiérarchie ou au juge d'application des peines.
Force mentale, rigueur, intégrité
L'autorité est un fondement essentiel dans le métier de surveillant, et il faut être droit et juste dans les relations avec la population pénale. C'est un travail qui demande beaucoup de mental. Il faut accepter de côtoyer la misère sociale, d'intervenir sur des situations à risques, des suicides etc... Il faut aussi savoir rester intègre, le risque de corruption existe ! D'ailleurs, les surveillants sont soumis à un code de déontologie, et prêtent désormais serment.
J'ai secouru un détenu qui tentait de se suicider
Les personnes détenues peuvent être en situation de vulnérabilité importante, et malgré un travail important de prévention, ce n'est pas toujours possible d'éviter le passage à l'acte. Quand je travaillais en détention, lors d'une ronde en service de nuit, j’ai dû intervenir auprès d’une personne détenue qui tentait de mettre fin à ses jours. Lorsque j’ai compris ce qui se passait, avec le chef nous sommes rentrés et avons immédiatement fait un massage cardiaque dans l'attente des pompiers. Ce détenu a survécu à sa tentative de suicide.
Ce moment de carrière rappelle que la mission de surveillance est large : assurer la sécurité de l’établissement et celle des personnes détenues peut se faire de nombreuses façons.